Rencontre avec le rédacteur en chef de notre quotidien régional

Publié le par C.D.I. du lycée Voltaire

A la Source de l’information…

 

Hervé Le Roux, rédacteur en chef adjoint

à la République du Centre,

répond aux élèves de 2nde

 

Cet atelier n°1 se déroulait ce fameux jeudi 30 janvier 2003 au rez-de-chaussée du C.D.I., de 10 heures ½ à midi. Hervé Le Roux, après s’être présenté, commença par un large exposé sur les principes de la presse écrite régionale, ici en l’occurrence La République du Centre, avant de solliciter les questions des élèves de 2nde présents à ce sujet. 

 

 

LA PRESSE ECRITE REGIONALE : PRESENTATION

 

Etre rédacteur en chef adjoint, c’est :

adopter une politique dans une entreprise de presse,

accompagner l’équipe de journalistes,

être attentif au lectorat.

 

La presse est un symbole fort : elle incarne les principes de la démocratie et de la liberté d’expression. Durant l’immédiat après-guerre, la presse fut ainsi davantage « idéologique », avec des tendances très marquées droite/gauche, Est/Ouest.

Hier comme aujourd’hui, c’est la publicité qui permet de réduire le coût d’un journal à l’achat, puisque son coût de fabrication reste toujours plus élevé que son prix à l’achat. Il faut qu’il le reste d’ailleurs de façon à ne pas dépasser en moyenne le prix du pain.  

 

La République du centre, c’est aujourd’hui 250 salariés, 90 journalistes.

Elle a été créée en 1944, sur les ruines du Républicain Orléanais qui a disparu, accusé de collaboration à l’époque pour le simple fait d’avoir continué à paraître sous l’Occupation.

 

L’échantillon de lecteurs est très large pour un journal régional, puisque ce dernier doit s’adresser à tous les publics, quelle que soit leur catégorie socioprofessionnelle.

 

Quant au métier de journaliste, l’un de mes grands plaisirs, c’est le contact avec les gens.

 

L’enjeu de ce type de journal au quotidien relève du défi puisqu’il s’agit de donner aux lecteurs une information de proximité sous tous les aspects du terme :

géographique (local)

proche des centres d’intérêt des gens qui lisent La République du centre.

en ramenant les sujets de société au rayon du local

ex. : les champs d’OGM dans la région  

Il existe en effet un lien affectif entre le lecteur et son journal.

D’ailleurs, de plus en plus de lecteurs, d’auditeurs, de téléspectateurs participent aux débats.

 

Enfin, vous avez dû remarquer que nous avions modifié le format du support de La République du centre de façon à le rendre plus pratique et plus maniable. C’est le 6e quotidien régional en France à le faire sur une centaine.

 

 

 

 

 

            QUESTIONS - REPONSES

 

Quels sont les critères de recrutement des journalistes ?

 

Historiquement, la presse régionale était ouverte aux gens de tout horizon. La curiosité d’esprit  et une solide culture générale suffisaient pour être recruté.

Aujourd’hui, il existe des écoles de journalisme spécialisées : le Centre de Formation des journalistes à Paris, L’Ecole de Journalisme de Lille, l’IUT de Bordeaux, l’IUT de Tours.

Le niveau relève maintenant plutôt du bac + 5. Les postulants ont acquis une excellente culture générale, une bonne maîtrise de la langue française et de l’anglais. Ils ont souvent commencé par 2 ans à Sciences-Po puis 3 ans en Ecole de Journalisme.

Il est rare maintenant de recruter quelqu’un venant d’autres  horizons.

 

Pourquoi les journalistes déforment-ils souvent ce que les gens disent ?

 

C’est remettre en question leur crédibilité. Cette demande d’exactitude du lecteur constitue la mission essentielle du journaliste.

Or cette crédibilité a été gommée ces dernières années. En effet, une étude montre que sur cette année 2002, les journalistes ont encore perdu en crédibilité, plus que les radios. Ces dernières précisément assurent depuis 5-6 ans une très bonne information et un dialogue constant avec les auditeurs.

Si reproches il y a, à quoi est-ce dû ?

  • - les informations ont été jugées incomplètes, imprécises
  • - c’est une volonté ou un dérapage du journaliste
  • - il y a aussi des choses que les lecteurs ne peuvent pas admettre (problème de maturité) : ex. : la Turquie dans l’Europe

Le journaliste doit être intègre, précis, objectif, objectif dans le sens où il fait preuve de neutralité et de recul vis-à-vis de l’information.

La devise de Sud- Ouest me paraît excellente en ce sens : « Les faits sont sacrés, les commentaires sont libres. »

Ne pas citer ses sources est encore un droit, MAIS il est de notre devoir d’expliquer et de réexpliquer sans cesse.

 

Vous inspirez-vous de la presse internationale ou nationale ?

 

Nos informations proviennent d’agences de presse, en l’occurrence l’A.F.P., financée par des actionnaires (la presse elle-même) et par l’Etat.

L’avantage qu’a la presse régionale par rapport à la presse nationale, c’est de pouvoir faire réagir les personnes « ressources » sur place sur tel ou tel événement.

 

 

Qu’est-ce qu’un pigiste ?

 

Littéralement, c’est un journaliste professionnel qui n’est pas encore attaché à une entreprise. Il est payé à l’article, au reportage.

La République du centre utilise quelques pigistes sous la forme d’information personnalisée sur tel ou tel sujet.

Cela peut être par exemple des lycéens ou des étudiants, qui commencent par traiter de l’information simple, et sont ainsi forcés d’entrer au contact des autres.

Nous avons aussi environ un millier de correspondants locaux chaque année.

Un journaliste professionnel, enfin, c’est une personne qui exerce ce métier de façon permanente, et qui est titulaire d’une carte de presse.

 

 

Y a-t-il de la censure de la part des rédactions ?

 

Il n’y a pas de censure.

Avant, elle s’exerçait par le biais du gouvernement et des élus locaux. Par exemple, il fallait davantage parler d’un député de droite que de gauche lorsque les élus étaient de droite.

Aujourd’hui, neutralité et objectivité sont les maîtres mots du journaliste. Cette logique d’information s’applique à tous les sujets. Si les journalistes dépassent le cadre légal, ils encourent un procès pour diffamation, soit pour une information fausse, soit pour une information non prouvée. Par ailleurs, ils sont tenus de respecter la présomption d’innocence, comme la vie privée et le droit à l’image des personnalités.

 

Quel est le coût de la publicité ?

 

Il dépend de l’emplacement de la publicité dans le journal, de ses jours de parution, de sa version en couleurs ou non,…Des emplacements sont la plupart du temps clairement établis au sein du journal. Ils constituent une source de revenus importante. Le journal deviendrait trop cher sans la publicité. Ainsi, la presse gratuite par exemple, qui prête à polémique, est entièrement financée par la publicité. Or l’objectif d’un journal comme le nôtre est justement de garder son indépendance.

 

(La presse est née chez nous, mais c’est le pays où on lit le moins la presse.)

 

Le premier exemplaire imprimé est ce qu’il y a de plus cher. Les autres exemplaires ne coûtent que le papier et l’encre. La République du centre s’est contrainte à ne pas changer de prix. Notre quotidien coûte le prix d’un timbre-poste pour être facile à commercialiser. (Une personne met en moyenne 20 minutes à lire un journal). L’abonnement à l’année est de 1200 F. Notre public est composé des couches sociales moyennes, il faut donc que le journal leur soit accessible. On cherche donc à améliorer la qualité de l’information pour un prix normal de revient de 9 Francs.

 

On dit beaucoup que les journalistes ont tendance à sur - médiatiser certains événements…

 

Le problème actuel, c’est de pouvoir évoquer les sujets à tabous, comme le problème de la pédophilie par exemple. Il s’agit d’audiences à huis clos car les victimes sont des enfants. Or ceci préoccupe la société. Comment faire alors sans transgresser la loi ? Soit on se résout au silence, soit on décide d’évoquer ce sujet de société au travers d’un dossier sérieux par exemple.

Est-ce racoleur d’aller voir les victimes de la route pour inciter les lecteurs à la prudence ?

Oui, cela fait vendre (ce qui nous intéresse bien sûr), mais cela signifie aussi que ces articles intéressent le public. Cela permet d’accompagner une réflexion collective, et sans tabou.

 

 

En fonction de quels critères choisissez-vous les informations à publier ?

 

En fonction de ce qui se passe ou de ce qui va se passer. Ce sont moins des comptes rendus que des amorces, une présentation d’événements à venir pour que le lecteur ait une pré-information sur ce qui va se passer, sur ce qu’il va voir (les manifestations culturelles, les brocantes par exemple).

 

 

Les événements sont-ils analysés quelquefois plus tard ?

 

L’atout, c’est en effet de pouvoir avoir du recul. L’handicap, c’est qu’après, c’est souvent trop tard. L’impression de la République du centre se déroule entre 1 heure et 4 heures du matin. Il existe une édition pour chaque arrondissement (Orléans, Giens, Montargis, Pithiviers). Souvent il existe des ressources pour pouvoir l’intégrer en dernière minute. Il faut être très réactif. Il faut un événement très important pour l’arrêter. Entre retarder le journal (livraison à 7 heures dans les kiosques au lieu de 6 heures) et reporter l’information, on choisit de reporter l’information.

 

Y a-t-il beaucoup d’invendus et qu’en faites-vous ?

 

Il s’agit de faire en sorte qu’il y ait suffisamment de journaux dans chaque kiosque, mais aussi qu’il y ait le moins d’invendus possible, ce que l’on appelle dans notre jargon le « bouillon ».

En plus du salaire, c’est le papier qui est le plus coûteux pour l’entreprise, avec l’inflation du pétrole. Il existe un budget – papier que l’on prévoit pour l’année. C’est uniquement du papier recyclé. On utilise des rotatives : ce sont des plaques d’aluminium qui par contact servent à imprimer le papier.

 

Comment gérez-vous alors le temps de sommeil ?

 

Ce sont des techniciens qui impriment le journal, et non les journalistes qui vont dormir !

Néanmoins, le métier de journaliste est très prenant. C’est tout un mode de vie.

 

Les journalistes paient-ils leurs sources ?

 

            Non. Payer n’est pas une garantie d’avoir la vérité. On ne paie que les photographies.

 

 

Propos retranscrits par Sandrine Leturcq  avec l’autorisation d’H. Le Roux

 

Publié dans Médias

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